Lecture : la clef de Berne

Ce n’est pas aux cheminots qu’il faut apprendre ce qu’est la clef de Berne. Mais pour les habitants de Délivrance, le « cane » (c’est son autre nom), modeste outil qui tient dans la main, que l’on glisse dans la sacoche, permet d’ouvrir les locos et voitures voyageurs. Alain Leduc, écrivain et critique d’art a choisi ce titre pour son livre de nouvelles : il y évoque la vie des cheminots. L’auteur a rencontré pendant un an des mécaniciens, agents de manœuvre, guichetiers, ajusteurs, cadres. Il a participé à leur vie, accompagné des trains, erré dans les gares. II s’est mêlé a des grèves et a assisté à des départs en retraite. Au fil des pages, nous sympathisons avec Duthoit le cheminot et Gabrielle sa compagne, prenant part à leurs amours, leurs sorties et leurs déboires. On est en gare de Lille, au marché de Wazemmes, on se réchauffe dans un bar, on fait la fête. Les dialogues sonnent vrais. On y entend des mots d’argot ou patoisants les expressions propres au cheminot s’y retrouvent.

II faut lire l’épisode du train (comme dans un roman) on suit un mécanicien prenant son service sur la machine haut-le-pied à Grande- Synthe pour tracter son lourd convoi de 2040 tonnes jusque Metz-Woippy.

Averti d’un dégagement de fumée en queue de train lors du passage d’une cabine d’aiguillage, il doit s’arrêter et aller visiter toute sa rame pour trouver l’essieu rougi par le manque d’huile, et tout cela dans la nuit et dans la neige, dans une courbe et entre deux tunnels ! ou bien le dernier train du mécanicien le jour de sa retraite, son cérémonial les pétards sur les voies et l’arrivée de sa machine au milieu des copains et de la famille réunis. Pour vous offrir la lecture de ces tranches de vie cheminotes allez feuilleter et emprunter à la bibliothèque de la rue Giraud ce beau livre édité et distribué grâce au comité d’entreprise de la S.N.C.F. : II se lit d’une seule traite, de bout en bout.