Le pont de la rue Jules Guesde, témoin de notre passé

20 février 2017 0 Par EDITEURS
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A l’origine, le pont de la rue Jules Guesde a été construit afin de pallier la coupure des liaisons entre le Bourg et le Marais de Lomme, occasionnée par la construction de la gare et de la cité de la Délivrance.

Mais en pratique, il peut avoir bien d’autres usages. L’un d’entre eux est encore plus flagrant depuis qu’il a été réaménagé avec l’implantation d’une large zone de passage piétonnière. On peut circuler à pied, ou prendre le temps de s’arrêter et de regarder autour de soi. On s’aperçoit qu’on est alors installé sur un véritable belvédère, un superbe point de vue qui nous permet de contempler 10 siècles d’histoire lommoise. Sous nos pieds, bien sûr, la gare de triage de Lille-Délivrance, puis en pivotant dans le sens des aiguilles d’une montre, s’offrent successivement à notre regard la cité de la Délivrance, la tour de l’Eglise du Bourg, puis la cheminée de l’usine Winkelmans, ensuite les lointaines tours d’Euralille, enfin le quartier du Marais et celui de Mont-à-Camp, avec son cimetière qui abrite également le carré militaire lommois et le monument du souvenir des victimes de la Seconde Guerre mondiale.

Ce tour de l’histoire de Lomme n’est pourtant pas fini. Il nous permet même de revenir au commencement. En effet, en levant les yeux et en regardant plein sud, dans la direction des rails filant devant vous, vous aviez encore depuis peu la possibilité d’apercevoir le dôme de l’ancienne l’abbaye devenue prison de Loos.

Au commencement, au début du XII° siècle, était un terrain en friche. Comme l’a écrit à la fin du XIXème siècle l’historien local C. S. Spriet, « le val paisible de la Deûle dite alors rivière de Wavrin, « vièse navie », peu profonde, lentement coulait le long de la route de Béthune et, par une courbe insensible, enfermait une solitude dans les marais ; des taillis en défendaient les approches, il n’y avait d’accès que par d’étroits sentiers perdus dans les broussailles. On passait la rivière aux planches de Loos, de Durmort, de Kesnoit (ainsi nommée des chênes qui croissaient aux environs) ». Cet endroit séduisit saint Bernard qui, de passage dans la région pour prêcher la Deuxième Croisade, y fonda une abbaye dont l’église porta le nom de Sainte Marie de Loos. Cette institution monastique, protégée par les comtes de Flandre et la noblesse locale, devint très vite l’une des plus puissantes des environs.

A cette époque, la Deûle passait à l’arrière de l’abbaye. Les moines pouvaient donc se rendre à pied sur les terres de Lomme, dont ils entreprirent la mise en culture. Ils canalisèrent également la rivière. Ils répandirent ainsi la prospérité sur le territoire dont ils avaient la propriété. L’abbaye de Loos fut l’un des principaux seigneurs lommois, ayant sous sa domination une partie du Marais et le bas de l’actuel quartier de la Délivrance. Cette situation perdura jusqu’à la Révolution française. Les bâtiments furent « nationalisés », c’est-à-dire mis à la disposition de la Nation. A l’époque napoléonienne, ils devinrent prison, rôle qu’ils remplissaient encore dernièrement.

Du canal actuel, du CVO ou du pont de la route de Loos qui enjambe ledit canal, on peut encore apercevoir le bâtiment du XVIIIème siècle, rénové récemment. Les bâtiments de l’ancienne abbaye étaient visibles de l’autoroute A25 et le dôme, du pont de la rue Jules Guesde.

Mais le temps et les dégradations ayant fait leur œuvre, l’administration pénitentiaire a fait le choix de raser l’édifice d’origine et de reconstruire sur le site un centre d’incarcération moderne. C’est donc un témoin de notre passé lommois qui disparaît et ne survivra plus dans la mémoire que grâce aux archives et à l’activité du centre mémoire de l’abbaye prison de Loos, association historique établie dans la commune du même nom.

Pensez donc à tout cela quand vous emprunterez le pont de la rue Jules Guesde à Lomme et admirez les traces de notre histoire qu’il nous est encore loisible de contempler.

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