Petit voyage dans le temps

7 décembre 2019 0 Par EDITEURS
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Au lendemain de l’événement dramatique du 10 avril 1944 qui vit s’effondrer la vie de la cité de Délivrance sous les bombes alliées, de nombreuses familles cheminotes durent quitter leur logement devenu inhabitable et quémander un abri auprès d’une famille épargnée ou de toute personne compatissante acceptant de les héberger pour une durée inconnue.
Pierre, fils de cheminot âgé de 8 ans à l’époque, se souvient de cet épisode et a confié au Bavard ses souvenirs d’enfant transporté dans un monde rural dont le mode de vie et l’éloignement des lieux éducatifs ou de loisirs bouleversait son quotidien.
C’est ce témoignage que nous publions dans ce numéro sachant qu’il est représentatif de nombreuses situations similaires vécues par les familles frappées par les destructions de leur logement qu’elles devront abandonner alors que la guerre continuait.


De Délivrance au hameau du Fresnel, avril 1944…

« Le 10 avril 1944, un déluge de bombes s’abattait sur la cité de Lille Délivrance et sur la gare de triage faisant un grand nombre de victimes et provoquant d’immenses destructions dans la gare mais surtout sur les maisons des cheminots dont plus de la moitié était dévastée et rendue inhabitable.

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Ma famille vécut cet enfer, blottie sous l’escalier, et sortit quasiment indemne pour rejoindre les autres habitants qui, hébétés, contemplaient la désolation du quartier et essayaient avec des moyens dérisoires de sauver les personnes enfouies sous les décombres.
Pendant deux à trois jours, nous errâmes dans des abris provisoires mis à disposition par des voisins compatissants. Mais il fallut rechercher un logement plus pérenne. Nous prîmes la route avec une carriole tirée par un âne emmenant le peu de mobilier pas trop endommagé pour nous réfugier chez une vieille dame propriétaire d’une ancienne forge, au hameau du Fresnel entre Pérenchies et Houplines, composé de quelques fermes et de maraîchers.

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Ce fut une vraie surprise pour mes parents, mes deux frères et moi-même. Agé de 8 ans, je découvrais un monde rural jusqu’alors inconnu qui ouvrait des espaces immenses consacrés à l’agriculture et au maraîchage d’où étaient absents les commerces traditionnels mais surtout l’école, le stade et la piscine que je fréquentais assidument dans mon quartier cheminot aujourd’hui anéanti. Nous étions devenus des « sinistrés » ou selon le cas, des « réfugiés ». Une nouvelle vie commençait avec les nombreuses contraintes d’un éloignement de toutes les structures éducatives et commerciales. Le matin, il me fallait partir assez tôt pour rejoindre à pied les classes de l’école primaire de Pérenchies qui se trouvait à 2,5 kms et cette distance, il me fallait la parcourir par tous les temps quatre fois par jour !

Une image contenant bâtiment, intérieur, photo Description générée automatiquement

Cette contrainte ne dura pas trop longtemps car ma mère, sur un conseil médical, jugea qu’il était préférable de rester le midi aux abords de l’école et faute de cantine, m’équiper d’un sac dans lequel elle pourrait loger une « gamelle » contenant quelques légumes à réchauffer et à consommer sur place.
Il fallait pour cela trouver un abri bienveillant et c’est ainsi que je pris pension au café Marseloo sur la place de l’église où je reçu un très bon accueil pendant tout mon séjour à Pérenchies. »

La guerre cependant continuait et rattraperait bientôt la famille de Pierre qui se croyait à l’abri dans cette jolie campagne.

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