La médecine à la Délivrance

4 janvier 2011 0 Par EDITEURS
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Petit rappel : en décembre 1954, notre ami le docteur JC pose sa plaque au 799 avenue de Dunkerque. Les clients affluent rapidement et très vite il ira prodiguer ses soins dans la cité de la Délivrance.

JC : Le contact s’établit : j’étais le jeune médecin le plus proche et disponible. J’ai ressenti une sympathie réciproque chez ces familles modestes. Le cœur sur la main, elles savaient donner leur confiance plus facilement que dans d’autres milieux sociaux.

Les logements étaient simples, les jardins potagers bien entretenus. A l’intérieur, le feu au charbon ronflait et, immanquablement, une friteuse, du steak de cheval… et la cafetière. Je faisais mes visites le matin, ma 2CV Citroën était repérée.

LB : Il y avait de la terre battue à l’époque ?

JC : Les rues importantes étaient pavées dans la partie centrale, les bas-côtés étaient empierrés. Le réseau restait encore marqué par le bombardement de 1944. Les pneus d’après-guerre étaient fragiles et les crevaisons fréquentes.

LB : Y avait-il des pathologies particulières au métier de cheminot, ce qu’on appellerait aujourd’hui des maladies professionnelles ?

JC : Les cheminots devaient s’adresser au médecin agréé par la SNCF. Les consultations avaient lieu au cabinet médical rue Albert Thomas. Ce vaste bâtiment accueillait les malades de l’Exploitation, de l’Atelier, du Dépôt et de la Gare. Les effectifs avoisinaient plus d’un millier d’agents.

LB : Cela signifie-t-il que vous ne pouviez soigner les cheminots ?

JC : Pas vraiment. Dans les familles, certains n’étaient pas satisfaits du médecin SNCF : ils ne voulaient pas livrer leurs petits secrets de santé ou leurs fautes d’hygiène. Ils consultaient alors un médecin de ville, mais celui-ci ne pouvait pas accorder d’arrêts de travail. De plus, quand une épouse ou un enfant était malade, je pouvais rédiger un certificat attestant que leur état nécessitait une présence parentale. Bien sûr il y avait des contrôles ce qui créait parfois des tensions entre les confrères, le médecin SNCF n’appréciait pas d’être « doublé » par un médecin libéral.

LB : Mais la SNCF n’a pas cherché à vous employer comme médecin des cheminots ?

JC : Absolument pas. Installé en libéral, je ne souhaitais pas sentir le poids d’un employeur.

LB : Avez-vous utilisé le dispensaire pour soigner?

JC : Le dispensaire était le domaine des assistantes sociales et des infirmières qui y assuraient des soins : pansements, vaccinations, piqures. Des consultations de nourrissons y étaient gratuites, c’était « la goutte de lait » très appréciée des mamans.

LB : Y pratiquait-on des soins plus lourds ?

JC : A la fin de l’hiver, les enfants victimes d’angines et d’otites à répétition présentaient une hypertrophie des amygdales. Leur état général était altéré par des hivers froids et humides.

Au printemps, un médecin ORL, professeur au C.H.R venait « arracher » les amygdales. Cette chirurgie de terrain, pratiquée en série sous anesthésie générale courte, ne serait plus de mise aujourd’hui car les saignements étaient parfois importants.

Le souvenir de ces séances est resté gravé dans la mémoire des parents comme des enfants.

En octobre 1955, un an après son installation, le Docteur Jacques Cotes prit le temps de se marier. Nicole acceptait de devenir l’épouse d’un médecin généraliste.

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