La fin d’une épopée

21 septembre 2014 0 Par EDITEURS
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En mai dernier, dans les journaux régionaux, la cessation de toute activité au triage de Lille-Délivrance était annoncée par la SNCF. Cette fermeture s’inscrit dans le cadre du plan de restructuration du frêt et touche plusieurs gares de triage en France.

Cette nouvelle, pas vraiment surprenante, n’est que l’aboutissement d’un long processus d’abandon du trafic marchandises par la SNCF.

La construction du triage en 1921 par la Compagnie des Chemins de Fer du Nord, juste après la grande guerre qui avait laissé un réseau complétement détruit, était devenue nécessaire pour absorber un trafic toujours plus important dans l’agglomération lilloise.

L’emplacement de la nouvelle gare et sa Cité correspondante avait été choisi pour sa proximité avec la voie de ceinture de Lille qui desservait bon nombre de gares (Fives, Lille Saint-Sauveur, Lille-Sud, Loos…)

Quelques 4000 ouvriers vont construire la gare et le dépôt à partir du mois de janvier 1921. Le triage des wagons sera opérationnel à partir du mois d’août de la même année.

On construit en parallèle tous les logements de la Cité, aussi quelques 835 logements sortiront de terre ainsi que de nombreux équipements et autres bâtiments tels que les écoles, le cabinet médical, les bains-douches, l’école ménagère….C’est l’une des plus grandes Cités du Nord après celle de Tergnier.

La Cité de Lille-Délivrance comptera 2815 habitants en 1922 et 3228 en 1926. Les cheminots trient pas moins de 3000 wagons par jour représentant 70 trains. La gare fonctionne 24 heures sur 24 et toute l’année.

Même après le bombardement de Pâques 1944, dont nous venons de célébrer le triste 70ème anniversaire, le dépôt maintient un bon rendement de triage.

La « Bosse » qui commande le freinage des wagons et qui semble bien vide

Malheureusement, la route prend de plus en plus de trafic de marchandises et le nombre de camions sur les routes ne cessent d’augmenter au détriment du rail.

La SNCF se tourne alors résolument vers le trafic voyageurs en développant les lignes à grande vitesse et laisse ainsi volontairement péricliter le frêt marchandises.

Le dépôt de Lille-Délivrance perd un peu plus chaque jour de son importance et quand en 2006 l’activité de triage est transférée à Somain, c’est la fin annoncée de l’existence même de la gare.

Ne restent plus alors à Lomme que l’activité liée à la clientèle de la métropole et le relais des parcours longue distance (les trains ne font que traverser la gare).

On ne parle plus que des arrêts en gare de Lille-Délivrance des convois transportant des déchets nucléaires qui entrainent régulièrement des manifestations de contestation.

Il n’aura pas fallu un siècle pour voir un projet si novateur tomber en désuétude. Bien sûr, il faut vivre avec son temps et ne pas refuser les progrès techniques qui nous facilitent en principe la vie de tous les jours. Mais la prolifération des voitures et des camions sur les routes et la pollution qu’elle entraine sont-elles vraiment source de progrès ?

Le nouveau directeur régional de la SNCF, Jacky Lion, précise que le Nord-Pas-de-Calais reste la deuxième région de France sur le plan ferroviaire, après la région Rhône-Alpes. Quelque 14.000 cheminots exercent dans les deux départements où 810 TER et 150 TGV en moyenne circulent chaque jour.

La nature a repris ses droits sur bon nombre de voies de triage

Il n’en reste pas moins vrai que les politiques successives menées par la SNCF depuis maintenant quelques décennies n’ont sûrement pas contribué à préserver un patrimoine pourtant très riche et le Bavard s’est souvent l’écho des désengagements successifs de cette grande maison.

Maintenant que cette fermeture est actée, il faut se poser la question du devenir des hectares de friches désormais laissés à l’abandon. Quel avenir pour la « raquette » ? Soyons sûr que la SNCF trouvera la solution la meilleure pour effacer à jamais presqu’un siècle d’histoire d’un quartier de la ville de Lomme.

Il subsiste encore quelques trains !
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